Ah Malaury … toujours pressée, toujours en train de courir, toujours en train de crier aussi. Une boule de nerfs comme disait son grand frère, elle ne tenait pas en place, elle semblait toujours avoir mille choses à faire quand elle passait furtivement dans son district. Elle était sur sa dernière année, du coup, forcément, elle était sur le terrain, à la Garnison, et elle avait plus de temps pour sa famille, pour elle. Mais visiblement, ça ne suffisait pas. Non. Pressée, comme à son habitude, elle venait de sortir d’une échoppe pour récupérer un remède avant d’attraper un panier de pain et de légumes qu’elle avait rempli au préalable pour finalement se mettre à courir directement la maison. Une vraie fusée, une fusée qui connaissait Shinganshina comme sa poche fort heureusement.

Cette fois, pourtant, visiblement, elle n’avait pas tout calculé. Elle n’avait, par exemple, pas calculer ce type de la garnison qui s’éloignait de la place et lorsqu’elle déboula du coin de la rue, les bras chargés ce fut bien évidemment l’incident. Elle lui rentra dedans de plein fouet, quelques pommes roulèrent autour d’eux et elle se releva à la vitesse de la lumière.

« Aie, aie … je ne vous ai pas blessé j’espère ? »

Manquerait plus que ça tiens, blesser un soldat dans l’exercice de ses fonctions, non mais sérieux.

Sa maladresse la tuera un jour … vraiment. Mais comment souvent, avec Malaury, c’est avant tout pour les autres qu’elle s’inquiète. Du coup, elle réagit au quart de tour. Heureusement, il n’a rien. Il semble sonné, un instant, mais il finit tout de même par ouvrir la bouche et elle lui offre un sourire, rassurée.

« Ne vous embêtez pas, vraiment … »

Elle se précipite pour l’aider à ramasser ce qui reste au sol, et puis elle reprend son panier, tout en continuant de le fixer. Elle avait cogné vachement fort quand même, du coup, elle continuait de se demander si vraiment il n’avait rien.

« Ne vous en faites pas, j’ai malheureusement l’habitude. Je suis solide ! »

Elle se redresse. Bon, elle a hérité du bosse sur le front en vérité mais … ça va.

Aussitôt, ses doigts viennent effleurer son front, la bosse qui s’y trouve. Elle était en plein milieu, super. Elle soupire, sans pour autant perdre son sourire.

« Je supporte ! Je suis un peu maladroite alors … »

En gros, elle a l’habitude de chuter et de se blesser, c’est pas la première fois et là, honnêtement, c’est plutôt mineur, par rapport à d’autres fois.

« Hé j’ai plutôt intérêt, j’entre dans la Garnison bientôt ! »

Et ça, elle en est pas peu fier. D’ailleurs, maintenant qu’elle y pense … elle se met à le détailler. L’observer.

« Je t’ai jamais vu … tu travailles souvent dans le coin ? »

Elle l’aurait remarqué hein … surtout connaissant Malaury, quoi.

Pourquoi la Garnison ? Mh. Elle a plusieurs raisons à ça, en réalité. La première, c’est qu’elle ne se voit tout simplement pas ailleurs, en réalité.

« Je veux bosser dans le coin. Et surtout, je veux être utile. »

Elle a bien trop peur de rejoindre les Bataillons, et elle sait bien qu’elle n’aura jamais l’accès aux Brigades Spéciales de toutes façons. Elle finit par hausser les épaules. Elle sourit. Elle sourit souvent. Elle est tellement insouciante, si joyeuse, à croire qu’elle vient d’un autre monde.

« Ça explique tout. Je connais presque tout le monde dans le coin. »

Elle se met à piétiner. Le panier dans ses bras commence à se faire lourd et mine de rien, la chute qu’elle vient de faire lui a saper une partie de son énergie légendaire.

« Ça fait longtemps que tu es soldat ? »

Oui enfin visiblement ça ne l’empêche pas de se montrer trop curieuse.

Elle hausse les épaules. Elle semble réfléchir un instant …

« C’est ma manière de me rendre utile. »

Elle ne se voyait pas ailleurs de toutes façons. L’armée, c’était un peu sa vocation. Elle voulait être l’héroïne de sa famille, ça lui tenait à cœur, c’est tout.

Après quelques secondes, il vient attraper le panier qu’elle tient entre ses bras. Elle fait la moue un instant avant de sourire.

« J’aurais pu le porter, d’abord. »

Ouais, ouais c’est ça. Elle ne l’avouera pas, mais en vrai ça l’arrange. Du coup, elle se penche un peu avant, tout à coup plus taquine.

« Ça veut dire que tu vas me raccompagner jusque chez moi ? »

Peut-être qu’elle en fait trop. Peut-être qu’elle abuse un peu, aussi. Mais bon, Malaury est bien incapable de se rendre compte par elle-même quand elle va trop loin. Ou alors bien trop tard. Disons que ça l’amuse, c’est une fille joyeuse, elle est souriante, taquine. Certains iront jusqu’à dire que cette fille-là, elle est quand même sacrément mignonne.

Il la raccompagne, et elle lui sourit avant de venir se placer à côté de lui, elle s’accroche à son bras comme s’ils se connaissaient depuis toujours.

« Marché conclus. Je m’appelle Malaury. »

Et elle se met à faire la moue … visiblement, être la seule à donner son prénom ne lui convient pas vraiment.

« Et toi, c’est quoi ton prénom ? »

« Glen. »

Elle répète son prénom, un peu comme pour l’imprimer dans sa mémoire. Elle est tellement distraite, elle pourrait lui redemander dans une heure. Mais elle sait que ça n’est pas très poli d’oublier le nom des gens si vite.

Elle le dirige, le guide tout en douceur en empruntant les bonnes rues, celles qui mènent jusqu’à la petite maison familiale. Mais, une fois arrivée à proximité, elle s’arrête. Elle grimace.

« Je dois vérifier si mes frères sont là … »

Elle n’avait pas spécialement envie de se prendre des remarques. Ses frères étaient lourds. Très lourds. Du coup, elle se détache du jeune homme, elle va jeter un œil à travers la fenêtre avant de lui faire signe d’approcher. A priori, la maison est vide.

Il ne bouge pas. Il reste planté, a quelques mètres d’elle avec le panier entre les bras et elle se demande ce qui lui arrive durant quelques secondes, avant qu’il ne se décide à parler pour exprimer ce qui le chiffonne. Elle grimace bizarrement. Et pourquoi pas, d’abord ? C’est pas comme si elle avait peur. Bon, il faut dire que Malaury est un peu naïve mais … bon. Elle hausse les épaules.

« Si, pourquoi ? »

Non, non. Elle ne voit vraiment pas le problème.

« Au pire si t’essaies de me sauter dessus je sais où frapper, t’en fais pas. »

Elle détourne le regard, observe la rue. Ok, elle est en train de s’impatienter là. Elle s’en fiche elle, elle a toujours eu une vie simple. Tout le monde entre chez elle comme dans un moulin.

« Bon tu viens ? »

Elle hausse les épaules de façon nonchalante mais, lorsqu’il s’approche d’elle et qu’il lui touche la joue, elle fronce les sourcils. C’est quoi cette manie qu’ont les gens de la prendre pour un bébé, ou pour une petite fille ? Elle souffle.

« Bah j’espère pour toi. J’ai un méchant coup de pied, y parait. »

Elle s’engouffre dans la maison, elle le laisse la suivre et elle va servir un verre d’eau qu’elle pose immédiatement sur la table.

« T’as qu’à tout posé par terre, ils rangeront plus tard. Tiens si t’as soif. »

Elle fait glisser le verre plein sur la table avant de se laisser tomber sur une chaise.